Hommage à Guy Goffette chez les Amis d’Arthur Rimbaud
Spécialiste de Paul Verlaine et d’Arthur Rimbaud, Guy Goffette est l’auteur d’une vaste œuvre littéraire pour laquelle il a reçu, entre autres, le prix Mallarmé en 1989, le Grand Prix de Poésie de l’Académie française en 2001 et le prestigieux prix Goncourt de poésie en 2010. Membre du comité de lecture Gallimard, il dirigea les collections Enfance en poésie et Folio junior en poésie. Il fut également le créateur des revues Triangles et l’Apprentypogaphe. Considéré comme l’un des plus importants auteurs belges contemporains, Guy Goffette était ardennais. Il nous a quittés au mois de mars 2024. |
Le samedi 26 avril 2025, l’Hôtel Littéraire Arthur Rimbaud était le théâtre d’un après-midi d’hommage au poète et romancier Guy Goffette.
Gaëlle Vatimbella, vice-présidente de l’association des Amis de Rimbaud, était le chef d’orchestre de cette manifestation, en partenariat avec la Société des Hôtels Littéraires, grâce à une initiative d’Isabelle Diu, conservatrice des bibliothèques.
Entretien avec Gaëlle Vatimbella et Isabelle Diu, qui ont accepté de revenir sur l’événement :


HL – Chère Gaëlle : Vous êtes vice-présidente de l’association des Amis de Rimbaud, pour laquelle vous organisez depuis plusieurs années des événements littéraires au sein de l’Hôtel Littéraire Arthur Rimbaud (Paris, Xe) ; pourriez-vous évoquer cette partie de votre activité ?
GV – C’est une grande joie mais aussi un grand honneur pour moi d’être vice-présidente des Amis de Rimbaud. Fondée en 1929 par l’homme de lettres ardennais Jean-Paul Vaillant, l’association a connu des présidents aussi prestigieux qu’Henri de Régnier, Paul Claudel, Jean Paulhan ou Pierre Brunel, chacun soucieux de faire briller l’œuvre d’Arthur Rimbaud au firmament. L’importance du legs poétique d’Arthur Rimbaud ainsi que le prestige du legs associatif sont une grande inspiration. J’y pense chaque fois que j’ai le plaisir d’organiser des événements littéraires au sein de l’Hôtel Littéraire Arthur Rimbaud. Toute l’équipe du bureau des Amis de Rimbaud et nos adhérents le savent : j’adore ça ! J’aime concevoir et fédérer.
Former puis coordonner une équipe d’artistes venus d’horizons et de courants artistiques différents. Mobiliser les talents au service d’un évènement littéraire procure une joie intense : on entend battre le cœur de la littérature. Elle est vivante. Elle continue de tisser un lien indéfectible entre les siècles et les hommes. Réjouir un public venu assister à une manifestation littéraire constitue le cœur même du tissu associatif : l’œuvre d’un auteur nous rassemble, ses mots nous permettent de rencontrer d’autres œuvres littéraires. Un langage projette d’autres visages de la scène poétique et artistique contemporaine dans la lumière. La littérature est une fête de l’esprit et des arts.
HL – Chère Isabelle : Conservatrice générale des bibliothèques, vous êtes l’initiatrice de cet hommage au poète Guy Goffette ; pourriez-vous nous présenter cet écrivain mort depuis peu et nous expliquer ce que vous aimez chez lui ?

HL – Chère Gaëlle : L’événement du 26 avril a été une grande réussite, et grâce à votre inlassable activité, a revêtu de multiples formes et requis la participation de nombreuses personnes ; pourriez-vous nous en faire un compte-rendu circonstancié ?
Ce fut un très bel évènement. Je tiens à remercier chaleureusement Isabelle Diu pour cette belle initiative.
L’hommage eut lieu dans une atmosphère d’authenticité et de grande complicité. Nous étions très heureux de former un chœur nouveau pour l’œuvre et le souvenir de Guy Goffette.
Dany Martin Goffette nous honorait de sa présence ; nous lui avons lu une lettre que lui adressait Alain Borer, notre président.
J’ai ensuite eu la grande joie de lire un très beau texte de l’éditeur et auteur Jean-Marie Laclavetine. Guy Goffette et Jean-Marie étaient proches. Dany Goffette a tenu à nous faire part du dernier vers rédigé par son époux. Le dernier vers de Guy Goffette fut pour son ami Jean-Marie Laclavetine. Une vive émotion s’éveilla dans la salle.
Nous sommes ensuite entrés dans l’œuvre du poète à proprement parler et nous y avons cheminé grâce à un florilège d’extraits proposé par le comédien Steve Bedrossian et le poète et critique littéraire Romain Frezzato.
Des passages de Verlaine d’Ardoise et de pluie d’abord.
Les lectures de Steve Bedrossian, de Jean-Luc Bresson, de la dramaturge et comédienne Pierrette Dupoyet étaient ponctuées de pièces de luth baroque composées par Sylvius Léopold Weiss interprétées pour l’occasion par le luthiste Jean-Luc Bresson. Romain Frezzato qui est non seulement poète et critique littéraire mais aussi professeur de littérature française en CPGE a donné une lecture de « Blues à Charlestown ». Une suite de treize vieux dizains composés par Guy Goffette dans son recueil Un Manteau de Fortune paru en 2001 chez Gallimard.
Isabelle Diu et moi-même avons eu la joie de lire ensemble un magnifique extrait de Partance et autre lieux : « d’Ardenne et d’exil » avant que Steve Bedrossian ne livre une magnifique interprétation de l’iconique Mon rêve familier de Paul Verlaine.
Le public venu, très nombreux, s’est ensuite lancé dans une ronde de questions et de souvenirs. La salle est repartie avec une œuvre picturale individuelle : j’avais peint chaque marque page pour l’occasion. Je désirais laisser une trace de cet évènement et de ses couleurs.
Ainsi l’âme du poète continue-t-elle de se promener et de chanter parmi les pages d’autres auteurs : poètes , essayistes, dramaturges ou romanciers.

HL – Chère Isabelle : L’œuvre de Guy Goffette est placée sous le signe de Verlaine et de Rimbaud ; quelles sont les influences croisées et les inspirations de ces poètes ?
Reconnaissez madame que mourirhors du dérèglement de tous les sensest triste et sans aucun profit (présentgâché que la vertu, la nuit vient viteet la plus belle rose est du fumier).

Le corps de l’homme en proieà l’errance s’habitue viteau visage nombreux de la mort :fatigue, dégoût, ruine de tous
projets, ces promesses pas à pasqui reculent, s’enfoncent dans l’hieret la nuit. Sur quoi vient la rouilledu moindre geste. On dirait
qu’elle se pose comme une feuillequand le sang ne veut plus courir,à bout de tant de regrets, remords,soupirs, ce qu’on porte malgré soi :
l’encombrant bouclier des vaincus.
